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Un(e) plasticien(ne) est une sorte de touche à tout qui oriente son action vers les arts visuels. Bien sur on peut dire peintre, sculpteur, dessinateur ou bien encore d’autres choses. Ce sont d’anciennes dénominations qui ne suffisent plus. Néanmoins pour être plasticien, il faut être tout ça en même temps, voir plus. La circulation de l’information est tellement riche aujourd’hui qu’on ne peut s’intéresser qu’à tout. L’édition, la bande dessinée, l’illustration, la scénographie, l’holographie, l’infographie, la vidéographie, … À chaque fois c’est la rencontre avec un nouveau mode d’écrire l’image. Je suis un visuel jusqu’au fond du ventre, c’est comme ça. Donc un plasticien est quelqu’un qui au gré du hasard produit des images dans différents contextes. Un artiste n’aime pas s’ennuyer dans les redites. Créer c’est aller dans toutes les directions. Les marchands d’art voudraient bien y trouver un style, quelque chose qui fasse que tout le monde puisse reconnaître. Pour moi, quand ça arrive c’est que l’artiste s’est perdu et qu’il se trouve dans une compulsion morbide d’auto citation. Ça lui permet sans doute de gagner de l’argent mais il y perd résolument son âme. Julio Le Parc m’a dit un jour lorsqu’on discutait de ma situation misérable de peintre “Ce ne serait pas de l’art si on ne souffrait pas un peu”. Cette phrase m’a marqué, j’ai eu le sentiment qu’il se moquait. C’était d’autant plus étonnant pour moi qu’il a produit un remarquable travail sur la torture en
Amérique latine et qu’à l’époque où il m’a dit ça, il était à fond dans un luminisme cinétique qui n’avait à mon sens pas grand chose à voir avec la souffrance. Avec le recul ses mots m’ont rattrapé, il ne pensait sans doute pas si bien dire. J’ai donc accepté l’idée que produire des images est le fruit d’une souffrance intérieure. Le mot souffrance a un sens bien particulier. C’est un état dans lequel on attend que quelque chose arrive comme une lettre dont on recherche le destinataire. L’inconfort de vivre avec ce doute permanent est peut être le prix à payer pour créer. J’ai donc choisi le terme plasticien pour éviter une catégorisation, un étiquetage enfermant. Contrairement à beaucoup d’artistes contemporains, j’aime expliquer mon travail, j’aime donner les clefs de ma production. Ce n’est pas une déformation professionnelle d’ex enseignant mais tout simplement ma manière de considérer que l’art est un lieu de communication avant tout. On produit des œuvres à destination d’un public. S’enfermer dans sa tour d’ivoire et penser que les gens n’ont qu’à comprendre par eux-mêmes est une attitude non-communicante. Je trouve cette posture stupide. Expliquer est donc une contrainte que j’assume parfaitement.